(cliquez sur les tableaux pour les agrandir)
Le quatrième bloc du système de retraite
a pour objectif de remplacer 70 % des revenus
gagnés par une rente
viagère (RV) provenant d'un REER. Une personne gagnant
50 000 $ par année – revenu moyen des meilleures années
– devrait pouvoir s'acheter une RV de 35 000 $ à 65 ans,
l'âge normal de la retraite. Certains prétendent que c'est
impossible présentement à cause des taux d'intérêt. Ces taux
historiquement bas seraient dus aux politiques monétaires des
banques centrales, particulièrement depuis la crise de 2008.
Rappelons les règles des
REER. Il faut investir 18 % de son revenu gagné pendant 35 années
pour espérer obtenir à 65 ans une RV égale à 70 % des
revenus perdus. En somme, dans un contexte normal, chaque année de
cotisation maximale donnerait 2 % des revenus perdus.
S'ajoutent la rente de
retraite du Régime de rentes du Québec (RRQ) et la Pension de
sécurité de la vieillesse (PSV) du fédéral qu'on retrouve
respectivement au premier et au deuxième bloc. Si ma RV est de
35 000 $, mes revenus de retraite à 65 ans pourraient
dépasser les revenus que j'ai perdus en arrêtant de travailler.
La valeur
d'une RV dépend de nombreux facteurs, mais les rendements sont
primordiaux.
Je vais donner des
exemples pour illustrer mon propos. Mes calculs seront faits à
partir du salaire industriel moyen (SIM) canadien. Pour simplifier,
j'utiliserai le maximum des gains admissibles (MGA) du RRQ. Il suit
de près le SIM.
Le MGA correspond à
peu près au SIM
Voici le MGA depuis 1966,
l'année du début du RRQ.
Tableau 1
Le tableau 1 indique
que les salaires ont été multipliés par 11 depuis 1966. Par
contre, ce
qui coûtait 5 000 $ en 1966 coûte aujourd'hui près de
37 000 $. À cause de l'inflation, nos salaires ne
sont que 50 % plus élevés. Cela donne un enrichissement
annualisé de 0,85 %.
Admettons que vous
réussissiez à cotiser 18 % de vos revenus gagnés pendant 35
ans dans des REER. C'est difficile pour les gagne-petit, mais moins
qu'il n'y paraît, car les cotisations réduisent les impôts. Le
coût réel est entre 10 % et 13 % du revenu. Vous êtes
très prudent ou même, peureux. Vous achetez des obligations à taux
fixe avec un terme de 10 ans. Épargne Placements Québec offre
2,55 % présentement. Mettons cela à 3 % pour l'exemple.
Qu'obtenez-vous? Après 35 années de cotisations, vous avez environ
356 000 $ à votre disposition à la fin de 2015. Vous
pourriez transférer votre REER dans un fonds enregistré de revenu
de retraite (FERR). C'est une excellente option sur laquelle je
reviendrai, mais vous choisissez d'acheter une RV.
Voici un tableau qui aide
à calculer approximativement le montant de la RV.
Tableau 2
Vous voyez que vos
356 000 $ ne suffisent pas pour remplacer 70 % de vos
revenus. Si vous choisissez une RV réversible au conjoint et
garantie 25 ans, vous recevrez environ 17 000 $ par année,
soit 4,7 % de votre capital (en jaune). Vous pourriez recevoir jusqu'à 22 800 $ à
condition d'acheter une RV non réversible et sans garantie.
Dans tous les cas, vous êtes loin des 35 000 $ souhaités.
Par contre, en
additionnant la rente du RRQ (maximum 8 800 $) et la PSV
(maximum 6 700 $) aux 17 000 $ de la RV, vous
voilà avec 32 500 $, soit 65 % des revenus perdus. Ce
n'est pas le pactole, mais on s'approche de l'objectif malgré le
très faible rendement de votre REER. L'objectif est atteignable pour
le bénéficiaire qui renonce à la réversibilité ou à toute
garantie.
Cet exemple est valable
pour un homme qui gagnait 50 000 $ à la fin de sa carrière
en 2015. Il a 65 ans et sa conjointe est cinq ans plus jeune.
L'exemple serait
différent pour une femme. La RV est plus petite parce que
l'espérance de vie des femmes est meilleure. C'est frustrant, mais
c'est ainsi que nos banquiers et nos assureurs calculent...
J'ai connu des années au
cours desquelles un capital de 356 000 $ suffisait pour
payer 70 % de 50 000 $. On pouvait acheter une RV de
35 000 $ ou plus parce que les
taux d'intérêt étaient extraordinairement élevés. Ce fut
une période faste pour les nouveaux retraités, mais exceptionnelle.
Dans la partie droite du tableau 2, j'évalue que 356 000 $
devraient pouvoir garantir entre 19 000 $ et 26 000 $
par année, soit entre 5,4 % et 7,4 % du capital (en vert). En additionnant la rente du RRQ et la PSV, on
atteindrait l'objectif : remplacer 70 % des revenus de
travail. On pourrait même le dépasser.
Un taux de conversion de
6,4 % (en jaune) est
présentement possible à condition d'acheter un RV non réversible
et sans aucune garantie. Si vous mourez immédiatement après avoir
signé votre contrat de rente, vous n'aurez rien reçu, votre
conjoint ne recevra rien, vos héritiers non plus. C'est le vendeur
qui empoche tout!
Pour recevoir une RV de
35 000 $, réversible et garantie 25 ans, vous auriez
besoin de 741 000 $ tels qu'indiqué au tableau 2. Le
rendement sur les cotisations devrait être de 7,1 % ou plus.
Impossible avec des investissements ordinaires. Il faut accepter de
prendre des risques pour obtenir un tel rendement.
La Caisse de dépôt et
de placements du Québec (CDPQ) prend des risques. On l'a bien vu en
2008 quand elle a subi des pertes de 25 %. Elle a connu de
bonnes et de mauvaises années. Au bout du compte, son rendement
annualisé a été de 8,6 %
au cours des cinquante dernières années. Cela prouve qu'il
est possible de faire mieux que 7 %.
L'avantage des fonds
enregistrés de revenus de retraite (FERR)
Quelqu'un qui a cotisé
au maximum à son REER depuis 1981 est aujourd'hui millionnaire s'il
a obtenu des rendements semblables à ceux de la CDPQ. C'est vrai
même si son salaire n'a jamais dépassé le SIM. Il pourrait
recevoir une RV de 47 000 $, réversible et garantie 25
ans. C'est 94 % de son dernier salaire de 50 000 $. En
ajoutant le RRQ et la PSV, il recevrait un total de 62 500 $!
Par contre, il devrait s'acheter un FERR si ses rendements sont plus
élevés que le taux de conversion la RV.
Le tableau 3
illustre cela.
Tableau 3
Si le bénéficiaire vit
jusqu'à 100 ans, il recevra près de 1,7 million $ de son
banquier ou de son assureur, mais il ne laissera rien à ses
héritiers puisqu'il renonce à son capital en achetant une RV. Il
est capable de faire mieux avec un FERR à condition d'aller chercher
un rendement supérieur au taux de distribution de 4,7 %. Dans
le tableau, le rendement sur le FERR est de 5 %. La rente
commence à 40 000 $ au lieu de 47 000 $, mais
elle augmente chaque année et monte jusqu'à 76 518 $
avant de redescendre à partir de 95 ans. Si le bénéficiaire meurt
à 100 ans, il aura reçu plus de 2 millions $ et laissera
près de 122 000 $ aux héritiers.
C'est quoi le problème
avec les REER?
On
peut encore préparer sa retraite avec des REER malgré les bas taux
d'intérêt. Il faut toutefois accepter d'en payer le prix :
18 % du revenu gagné pendant 35 années ou plus. Il faut
aussi trouver un bon gestionnaire de fonds pour maximiser les
rendements. Ce n'est malheureusement pas à la portée de toutes les
bourses. Voilà la principale faiblesse des REER. Ce sont des régimes
qui profitent surtout à ceux qui ont les moyens de cotiser au
maximum et de recourir à des spécialistes.
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