jeudi 12 janvier 2017

Comment le système de retraite devrait-il fonctionner?

(cliquez sur les tableaux pour les agrandir)

Dans son document deconsultation publique sur le Régime de rentes du Québec (RRQ), le gouvernement du Québec nous donne le choix d'adopter les modifications prochaines du Régime de pensions du Canada (RPC), ou de se contenter d'une réforme moins coûteuse et moins avantageuse, ou de ne rien changer du tout.

Il y a quasi-unanimité pour dénoncer ce choix bancal. Le statut quo est, quant à moi, impensable. Une réforme moins avantageuse ferait des Québécois des citoyens de seconde classe par rapport aux autres Canadiens. N'en déplaise au Premier ministre Philippe Couillard, il faudra peut-être s'arrimer à la réforme du RPC.

Malheureusement, la réforme du RPC est elle-même fort timide. Ne pourrait-on faire mieux sans tout chambouler? Ce serait possible en réformant l'ensemble du système, pas seulement le RRQ et le RPC. Je vous présente onze propositions qui modifieraient les quatre blocs du système.


Les modifications visent à garantir aux personnes gagnant moins que le salaire industriel moyen (SIM) des revenus de retraite correspondant à 70 % de leurs revenus de travail. Au Canada, environ 70 % des travailleurs gagnent moins que le SIM; au Québec, c'est plus près de 75 %.

Balises de mes propositions

Le rôle essentiel du système de retraite est de remplacer les revenus de travail par des revenus de pensions équivalents. Un petit salaire est remplacé par une petite pension; un gros salaire, par une grosse pension.

Les modifications que je propose visent les salariés et les autonomes dont les revenus de travail sont inférieurs à 54 900 $, le maximum des gains admissibles (MGA) au RRQ en 2016.

Le MGA correspond à peu près au SIM. Par conséquent, tous ceux qui gagnent moins – à peu près 3 travailleurs sur 4 – seraient convenablement protégés.

Les modifications pourraient s'appliquer aussi au RPC, l'équivalent du RRQ pour le reste du Canada. Généralement, je ne parlerai que du RRQ pour alléger le texte.

Ceux qui gagnent moins que 29 646 $ (54 % du MGA) ne seront jamais riches, mais leur faible pouvoir d'achat est protégé – souvent amélioré – à 65 ans avec le système actuel.

Si mes propositions étaient appliquées, ceux qui gagnent entre 29 646 $ et 54 900 $ ne pourraient plus recourir au SRG payé par le fédéral, mais leurs revenus de retraite correspondraient à environ 70 % de leurs revenus de travail. Ceux au-dessus de 54 900 $ seraient protégés comme s'ils gagnaient ce montant.

Modifications au programme de la sécurité de la vieillesse

La classe moyenne sera éventuellement privée de la PSV si rien ne change. Présentement, la PSV remplace 13 % de la moyenne du maximum des gains admissibles (MMGA) du RRQ. Dans 50 ans, elle ne remplacera plus que 8 % et dans 100 ans, presque plus rien.

La MMGA sert à calculer la rente de retraite payable par le RRQ. On devrait l'utiliser aussi pour stabiliser la PSV.

Première proposition

Je propose d'augmenter la PSV pour qu'elle remplace 15 % de la MMGA, et qu'elle soit ajustée chaque année en conséquence.

La PSV passerait de 578,53 $ à 655,50 $ (7 866 $ par année).

La rente maximale du RRQ correspondant à 25 % de la MMGA, nous aurions toujours un total de 40 %. Une fois en paiement, la PSV serait seulement indexée au coût de la vie, comme c'est le cas au RRQ.

Deuxième proposition

Je propose de fixer chaque année le seuil minimal de récupération de la PSV à 1,4 fois la MMGA.

En arrondissant les centaines, cela donnerait 73 400 $ au lieu de 72 809 $.

Les deux premières propositions visent à pérenniser la PSV, du moins pour la classe moyenne.

Point faible de mes propositions concernant la PSV

Le fédéral a choisi d'augmenter le SRG à partir de juillet 2016. Cela signifie qu'il n'a pas l'intention de stabiliser la PSV comme je le suggère. Il faudra insister pour qu'il change d'idée.

Sans compter qu'il s'agit d'une portion essentielle du système actuel, j'ai trois arguments pour appuyer mes propositions.

  • La PSV est imposable, contrairement au SRG. Les gouvernements récupéreraient environ le tiers des augmentations. Par ailleurs, ce qu'on ajouterait à la PSV pourrait être retranché du SRG et des allocations.
  • Le dilemme du samaritain. Si les personnes âgées perdent la PSV, elles utiliseront des stratégies leur permettant de remplacer une part importante de leurs revenus par du SRG. Pour plus de détails : Jonathan R. Kesselman, Expanding Canada Pension Plan Retirement Benefits: Assessing Big CPP Proposals, page 25, disponible sur le web.
  • Le revenu minimum garanti. La PSV, avant l'impôt de récupération, était un revenu minimum garanti aux personnes âgées. De plus en plus d'experts pensent que c'est une mesure sociale qu'il faudra étendre, tôt ou tard, à l'ensemble des citoyens. Pourquoi défaire ce qu'il faudra refaire?

Modifications au Régime de rentes du Québec (RRQ)

Nos gouvernements veulent améliorer le RRQ et le RPC en augmentant le MGA et le taux de remplacement des revenus. Ces régimes, jusqu'à récemment, étaient basés sur la responsabilité intergénérationnelle. Cela coûte très cher présentement, en partie parce que la pyramide des âges est inversée. Au RPC, la loi a été changée. Dorénavant, toute amélioration du RPC doit être entièrement capitalisée. La réforme du RPC sera donc payée par ceux qui en profiteront et non par leurs enfants... On espère qu'il en sera de même avec la réforme du RRQ.

Quoi qu'il en soit, de mon point de vue, la réforme du RPC va trop loin en augmentant le MGA de 14 %. C'est la responsabilité des individus de préparer leur retraite. La responsabilité des gouvernements est de lutter contre la pauvreté et de protéger l'ensemble des citoyens contre les plus négligents. Le SRG sert à protéger les personnes qui ont vécu avec de faibles revenus. Il n'a pas été créé dans le but d'aider celles qui furent négligentes. Dans cette optique, je ne crois pas utile d'augmenter le MGA. Il suffit de protéger tout le monde jusqu'à hauteur du MGA actuel. Ceux qui gagnent plus pourront se payer une meilleure protection avec des RCR ou des REER.

Inversement, la réforme du RPC ne va pas assez loin en augmentant le taux de remplacement des revenus de 25 % à 33 %. Toute personne gagnant moins que le MGA devrait être capable de prendre sa retraite avec 70 % de ses revenus de travail moyens.

Troisième proposition

Je propose que le taux de remplacement des revenus reste à 25 %, mais qu'on ajoute à ce taux fixe un nouveau taux variable. Celui-ci remplacerait 16,2 % d'un revenu de travail égal à 54 % de la MMGA. Il augmenterait par tranches de 0,3 % pour atteindre 30 % d'un revenu de travail égal à la MMGA.

Le RRQ paierait deux pensions. La première serait la rente de retraite habituelle. La seconde serait une rente supplémentaire (RS) payée, comme indiqué plus loin, grâce à des cotisations à taux variables. Combinées avec la PSV, les deux rentes remplaceraient 70 % des revenus de travail à 65 ans.

Le tableau 15 illustre le fonctionnement.

Tableau 15

La PSV est un montant fixe de 7 866 $ (en présumant la mise en œuvre de la 1ère proposition). Son taux de remplacement varie en fonction des revenus. Celui de la RS varie dans le sens inverse. Au total, les revenus de retraite correspondent à 70 % des revenus de travail.

Tous les travailleurs – salariés et autonomes – seraient obligés de cotiser entre 25 et 65 ans s'ils ont des revenus de travail supérieurs à 54 % du MGA (29 646 $ en 2016). L'Agence du revenu du Québec serait chargée de ramasser les cotisations, ce qu'elle fait déjà pour le RRQ. Retraite Québec (anciennement, la Régie des rentes du Québec) administrerait le programme. Les cotisations seraient confiées à la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ).

L'exemption de cotiser sur les premiers 3 500 $ gagnés ne s’appliquerait pas à la RS. Par contre, une personne avec des revenus de travail inférieurs à 54 % du MGA ne cotiserait pas personnellement puisque le système actuel la protège convenablement.

Période cotisable de 40 ans

Pour recevoir la PSV complète, il faut avoir résidé au Canada durant 40 ans depuis l'âge de 18. Pour recevoir la rente maximale du RRQ, il faut avoir cotisé au maximum durant 40 ans. Voilà pourquoi je fixerais la période cotisable à 40 ans pour la RS. Par ailleurs, cela permet de réduire le coût des cotisations.

La participation des employeurs

Les employeurs seraient obligés de cotiser 2 % du salaire de chaque employé sans dépasser 2 % du MGA. C'est ce que devrait leur coûter la réforme du RPC telle que proposée par le fédéral. Ils pourraient cotiser davantage s'ils le désirent. Pour les employés avec des revenus inférieurs à 54 % du MGA (29 646 $), les cotisations de l'employeur serviraient à verser une RS qui réduirait le SRG.

Pourquoi limiter à 2 % les cotisations des employeurs?
  • Cela correspond au coût du projet fédéral actuel.
  • Ils ne peuvent pas s'opposer, leurs coûts restant concurrentiels par rapport aux employeurs américains.
  • Ils refuseront de faire mieux que leurs voisins.

Je suis allé voir comment fonctionne le système de retraite aux États-Unis. Ils ont l'équivalent de la PSV, du SRG, du RRQ et du RPC. C'est en un seul programme appelé Social Security qui date du New Deal de Roosevelt après le krach de 1929. En fait, comme leur système est plus vieux que le nôtre, nous avons beaucoup emprunté leurs idées en créant le RRQ et le RPC en 1966. Les modifications annoncées par Ottawa ne vont pas plus loin que ce qui existe depuis belle lurette aux États-Unis. Nos coûts ne devraient donc pas dépasser les leurs.

Les Américains ont aussi l'équivalent de nos RCR et de nos REER. C'est quasiment du copier-coller. Nous sommes à la traîne de nos riches et puissants voisins. Nos employeurs trouvent que c'est bien ainsi. Ils ne veulent pas d'un système qui leur coûterait plus cher et qui pourrait nuire à leur compétitivité.

Les cotisations totales

Je fixerais la cotisation brute à 8 % du maximum des gains admissibles (MGA). C'est le taux qu'on doit appliquer si les hypothèses suivantes sont avérées :
  • Le coût de la vie augmentera en moyenne de 4 % par année ou moins au cours des 50 prochaines années.
  • Le SIM augmentera en moyenne de 5 % par année ou moins au cours des 50 prochaines années.
  • Le rendement sur les cotisations sera de 300 points supérieur à l'augmentation du coût de la vie après les frais d'administration ou de gestion. Par exemple, si le coût de la vie augmentait en moyenne de 2 % par année, le rendement serait en moyenne de 5 %.
  • Les frais d'administration ou de gestion ne dépasseront pas 4 % des cotisations accumulées.

Les cotisations accumulées correspondent à celles versées, auxquelles on ajoute les rendements obtenus. Elles seraient immobilisées jusqu'au paiement de la rente de retraite habituelle du RRQ. Toutefois, elles pourraient être libérées avant la retraite pour des raisons exceptionnelles. Par exemple, si une personne est admissible à la rente d'invalidité du RRQ ou si elle meurt...

Ceux qui gagnent plus que le MGA cesseraient de cotiser avant la fin de l'année comme présentement. Ceux qui gagnent moins cotiseraient durant toute l'année, mais à un taux plus faible. Ainsi, le taux serait de 4,32 % pour ceux qui gagnent 54 % du MGA.

On verra plus loin que le taux de cotisation net serait dans tous les cas beaucoup plus bas.

Modifications fiscales

Présentement, les gagne-petit n'épargnent que 27 % d'impôts. De quoi décourager l'épargne-retraite pour les travailleurs à faibles revenus. Un crédit uniforme réduirait le coût de leurs épargnes et pourrait être fiscalement neutre.

Quatrième proposition

Je propose qu'un crédit d'impôt de 35 % (15 % au fédéral et 20 % au provincial) soit applicable sur toute épargne-retraite, sur des montants inférieurs au MGA.

Ce crédit est déjà appliqué sur les cotisations au RRQ. Il suffirait de l'étendre aux RCR et aux REER.

Cinqième proposition

Je propose que le crédit d'impôt provincial appliqué sur les cotisations au RRQ ne soit plus intégré au montant personnel de base.

Ni aucun autre crédit d'ailleurs...

L'Agence du revenu du Québec fait preuve de beaucoup de créativité quand vient le temps de nous soutirer des sous... Nous avons tous remarqué que le montant personnel de base au provincial (11 425 $ en 2015) est semblable à celui du fédéral (11 327 $ en 2015). Mais qui sait qu'au provincial ce « montant tientcompte des cotisations payées au Régime de rentes du Québec, auRégime québécois d'assurance parentale, au Fonds des services desanté et à l'assurance emploi »? Quand on soustrait tout cela, on se rend compte qu'Ottawa est beaucoup plus généreux que Québec.

L'augmentation des cotisations au RRQ est presque toujours plus importante que celle de l'indice des prix à la consommation (IPC). Or, le montant personnel de base n'est qu'indexé à l'IPC. À cause de cela, rien de ce qui est inclus dans le montant personnel de base ne profite entièrement de l'exemption de 20 %.

Je comprends qu'il faille aider les plus démunis, mais pourquoi ne pas avoir un vrai montant personnel de base comme au fédéral au lieu de faire des cachotteries à la classe moyenne?

Sixième proposition

Je propose la création d'un crédit spécial pour compenser la perte, en tout ou en partie, du SRG.

Le crédit commencerait à 46 % et baisserait progressivement. Il ne serait pas applicable à des revenus supérieurs au MGA.

Le tableau 16 donne une idée du résultat final.

Tableau 16

Le revenu net après impôts (3e et 4e colonnes) a été déterminé avec la calculatrice de Thomson Reuters. Le crédit uniforme de 35 % s'appliquerait aux cotisations sur des revenus de travail inférieurs au MGA. Le crédit spécial dépendrait de l’ensemble des revenus. Par exemple, quelqu'un qui aurait des revenus de travail de 30 000 $ et des revenus de location de 25 000 $ (revenus nets avant l'amortissement immobilier) ne serait pas admissible au crédit spécial.

Le coût de la RS (dernière colonne) est la différence entre le revenu net après impôts et celui après avoir cotisé à la RS (les deux colonnes avant la dernière). Le coût net pour les salariés est inférieur à 1 % pour ceux qui gagnent 65 % du MGA ou moins. Il monte ensuite et atteint près de 4 % pour ceux qui sont au MGA. Le coût net pour les autonomes serait évidemment un peu plus élevé.

Partager les risques

Ceux qui terminent leur vie active avec une année de rendements négatifs risqueraient de recevoir une RS plus petite que prévu. Dans certains cas, la baisse est dramatique. Par exemple, en 2008, les rendements ont chuté brutalement. Ceux qui ont acheté une rente viagère (RV) durant cette période reçoivent peut-être moins d'argent que s'ils avaient quitté en 2007. La prochaine proposition vise à éviter ce désagrément en partageant le risque entre tous les cotisants.

Septième proposition

Je propose que la RS soit calculée à partir de la moyenne des cotisations accumulées (MCA) au cours de cinq périodes de douze mois précédant le paiement.

Les rendements positifs étant beaucoup plus nombreux que les négatifs, ma proposition créerait des surplus actuariels. Il faudrait augmenter le résultat d'un pourcentage permettant d'éviter des surplus. La formule reste à inventer, mais l'augmentation serait d'environ 15 % présentement.

Ma proposition est valable également pour les régimes de retraite privés à cotisations déterminées (RCR CD). Les participants à ce type de régime reçoivent eux aussi une pension réduite quand ils prennent leur retraite à un moment inopportun.


Huitième proposition

Pour le paiement de la RS, je propose d'établir un montant par défaut correspondant au minimum prescrit sur les fonds enregistrés de revenus de retraite (FERR).

Cependant, le bénéficiaire pourrait choisir de recevoir le plus élevé de
  1. le minimum prescrit sur les FERR (pour rester conforme à la Loi de l'impôt)
  2. avant 95 ans, le montant de l'année précédente (pour éviter de recevoir moins)
  3. la MCA avant le premier paiement, multipliée par le taux de conversion d'une rente viagère (RV) (pour recevoir, au cours des premières années et après 94 ans, l'équivalent d'une RV).
Le taux de conversion pourrait être établi par règlement à partir de la moyenne du marché. Il suit habituellement de près le rendement des bons du trésor.

À titre d'exemple, en octobre 2016, le taux de conversion était d'environ 4,7 % pour une RV réversible au conjoint et garantie pendant 25 années. Avec un capital de 100 000 $, on pouvait donc acheter une RV de 4 700 $ par année.

Pour que la RS soit réversible à son décès, le bénéficiaire pourrait demander que le minimum prescrit sur les FERR soit calculé à partir de l'âge du conjoint le plus jeune. Sinon, la somme résiduelle serait payable à la succession.

La RS ne viendrait avec aucune garantie de durée. Elle cesserait quand le bénéficiaire n'aurait plus d'argent dans son compte. Malgré les fluctuations des marchés et les crises économiques, cela risque peu d'arriver tant que le rendement annualisé de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) resterait, à long terme, de 5 % ou plus. Au cours des 40 dernières années, il a été de 9,6 % (tableau 3, plus loin). Il devrait être moins élevé à l'avenir, mais les actuaires de Retraite Québec prévoient quand même jusqu'à 7 % dans l'évaluation actuarielle de 2015.

La RS n'est pas indexée au coût de la vie, mais le montant par défaut augmente jusqu'à 95 ans, sauf certaines années de rendements médiocres ou négatifs. L'augmentation est habituellement supérieure au coût de la vie.

Mes propositions fonctionnent-elles également pour tous?

Mes propositions fonctionnent bien pour les travailleurs avec un parcours typique; ceux dont les revenus de travail – sans être nécessairement égaux au SIM – augmentent à peu près au même rythme. Ceux avec un parcours atypique risquent de trop cotiser ou pas assez. Ceux dont les revenus augmentent moins vite que le SIM cotiseraient trop. Ils dépasseraient l'objectif et se retrouveraient avec des revenus de retraite supérieurs à 70 % de leurs revenus de travail. Je ne crois pas que cela les chagrinerait... Ceux dont les revenus augmentent plus rapidement que le SIM ne cotiseraient peut-être pas suffisamment. En tout cas, ils se rapprocheraient de l'objectif et devraient avoir les moyens de se payer un REER s'ils le jugeaient nécessaire. Retraite Québec pourrait même se donner le mandat de les conseiller à ce sujet.

Modifications aux REER

Le tableau 17 compare le rendement de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) à d'autres.

Tableau 17

Le taux annuel moyen d'inflation a été établi avec la feuillede calcul de la Banque du Canada.

Quelle que soit la période, la CDPQ a toujours battu le Dow Jones (Bourse de New York) et encore plus le S&P/TSX (Bourse de Toronto). La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) offre à ses membres des REER avec des rendements comparables, du moins sur des périodes inférieures à 15 ans. La FMOQ ne détaille pas les rendements à très long terme. La Banque royale (RBC) offre aussi des rendements très compétitifs, comme les autres banques. Mais la RBC, comme les autres banques, a des portefeuilles dits « équilibrés » qui ont rapporté moins de 3 % par année sur une période supérieure à 15 ans. Pire, comme toutes les autres institutions financières, elle vend des REER qui ne rapportent à peu près rien.

Les REER sont souvent achetés pour la mauvaise raison : payer moins d'impôts... Les acheteurs ne prêtent pas toujours attention aux rendements.

Dans son Cyberbulletin du 7 octobre 2015, l'Institut CD Howe évalue que les rendements réels sur lesinvestissements sans risque ne seront à l'avenir que d’environ 1 %. Impossible de préparer convenablement sa retraite avec si peu.

Neuvième proposition

Je propose que les REER soient vendus avec une option de placement par défaut, déterminée par règlement.

Le niveau de risque serait établi en fonction de l'âge de l'acheteur. On pourrait s'inspirer de l'option par défaut des régimes volontaires d’épargne-retraite (RVER).

Pourquoi? La réponse est au tableau 3. Taux d'inflation au cours des 50 dernières années : 4,06 %. Rendement du Dow Jones : 6,51 %. Rendement de la CDPQ : 8,73 %. Si la CDPQ a battu le Dow Jones, c'est parce qu'elle prend des risques. Rappelons-nous 2008 : perte de 25 %. Malgré cette catastrophe, son rendement annualisé dépasse celui de la Bourse de New York.

Quand on a 35 ans ou plus pour faire fructifier ses économies, prendre des risques vaut le coup. Se contenter de rendements réels d'environ 1 % sur des investissements sans risques est de la très mauvaise planification.

Dixième proposition

Je propose que les institutions financières soient obligées de transmettre une fois par année les informations suivantes :
  • Le montant de la RV qui serait payable si l'acheteur avait déjà 65 ans.
  • Le montant de la RV, en dollars courants, que l'acheteur pourrait recevoir à 65 ans en continuant de cotiser jusque là, comme l'année précédente.

Il est évident que ce ne serait que des estimations, mais cela permettrait de mesurer l'efficacité de nos placements et de corriger le tir au besoin.

Onzième proposition

Je propose que les modifications au RPC et au RRQ ne changent pas le calcul du montant maximum déductible au titre des REER.

Pour l'instant, le fédéral est d'accord. Il indique que les modifications qu'il veut apporter au RPC n'auront pas d'impact sur les REER.

Mes propositions plairont-elles à tout le monde?

Si nécessaire, l'opinion publique ne serait probablement pas difficile à convaincre. Gérard Bérubé écrit dans le Devoir : « Un membre de la génération du millénaire sur deux affirme être disposé à sacrifier une partie de son salaire en échange d’une plus grande sécurité en matière de prestations de retraite ».

Les modifications proposées au RRQ et au RPC sont est un mélange de REER et de RCR.

Elles s'apparentent à un REER parce que la rente supplémentaire (RS) est soumise à des règles comparables à celles des FERR avec la 8e proposition. Par ailleurs, les cotisations du participant lui appartiennent, ainsi que les rendements obtenus. Il est certain de récupérer son argent, comme s'il avait acheté un REER.

Elles sont semblables à un RCR parce qu'il s'agit d'un régime obligatoire pour tous les participants au RRQ. Il n'y a pas de cotisations volontaires, sauf du côté le l'employeur s'il désire payer plus que les 2 % exigés. De plus, les risques reliés aux rendements sont partagés. Avec la 7e proposition, les gains comme les pertes extraordinaires sont aplanis. Cela permet à la CDPQ de prendre les risques habituels afin de maximiser le rendement à long terme.

Notez que la RS n'est pas une RV achetée auprès d'une institution financière. Elle est payée par Retraite Québec. Son montant ne dépend ni du sexe du bénéficiaire, ni de la périodicité des versements, ni du taux de conversion des RV.

Les actifs doivent-ils être pris en compte comme le suggère l'Institut CD Howe dans son Commentaire no 457?

Certains spécialistes pensent que les actifs doivent être pris en compte quand on prépare sa retraite. On peut avoir des comptes d'épargne libres d'impôts (CELI) qui aideraient à joindre les deux bouts. Quand on est propriétaire de sa maison, on peut acheter une hypothèque inversée afin d'augmenter ses revenus. Un travailleur autonome pourrait peut-être se payer une retraite très agréable après avoir vendu son entreprise.

De mon point de vue, ce sont des pis-aller. Je n'ai rien contre ceux qui dilapident leur patrimoine pour se payer du bon temps, mais on ne devrait pas être forcé de le faire pour boucler nos fins de mois. Le système de retraite doit permettre d'éviter cela. Nous jouissons d'une retraite relativement confortable quand nos rentes et pensions suffisent pour maintenir notre train de vie habituel sans toucher à nos principaux actifs.

Faut-il hausser l'âge normal de la retraite?

L'âge normal de la retraite est 65 ans. Le système coûte cher. Il est évident qu'augmenter l'âge réduirait la pression sur l'ensemble du système en allongeant la période cotisable et en raccourcissant d'autant celle de la retraite.

Pérenniser la PSV (1ère et 2e propositions) coûterait des sous. Augmenter l'âge normal à 67 ans pour compenser serait une mesure acceptable. Cela neutraliserait ou, à tout le moins, réduirait le coût de l'opération.

Augmenter l'âge devrait permettre également de réduire les coûts du RRQ, de son jumeau, le RPC et des RCR, particulièrement ceux à prestations déterminés. La mesure ne serait pas pénalisante si, comme anticipé, ceux qui entrent sur le marché du travail vivent plus longtemps que ceux qui sont déjà retraités.

L'augmentation devrait être très progressive. Par exemple, d'un mois par année au cours des 24 prochaines années.

Certaines tâches difficiles réduisent possiblement l'espérance de vie. Il faudrait en tenir compte si tel est le cas. Moduler l'âge de la retraite en fonction des risques du métier me paraîtrait équitable.

Pour approfondir le sujet

J'ai mis à votre disposition le mémoire que j'ai préparé pour la Commission des finances publiques de l'Assemblée nationale. Il explique en détail comment fonctionne le système de retraite canadien et comment, à mon avis, il devrait fonctionner. On y trouve le contenu de ce blog et un peu plus dans un format différent. Vous pouvez le télécharger et le partager sans frais.

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